Charente-Maritime (17)

Mortagne sur Gironde

     Bordant les rives de l'estuaire de la Gironde, cette petite cité fut pendant plusieurs siècles une principauté, titre qu'elle acquit au lendemain de la Guerre de Cent ans, mais finit par perdre par déshérence. Importante place-forte militaire, elle devint également un port de premier ordre au XVIIIe siècle, classé troisième port de Gironde (après Bordeaux et Blaye) au milieu du XXe siècle, avant de décliner peu à peu. Elle vit aujourd'hui principalement du tourisme, restant malgré tout un port de pêche relativement actif.       

 La cité est divisée en deux entités distinctes : la ville ancienne, campée sur une falaise, s'organise autour de son église et de quelques rues commerçantes, tandis que le port, en contrebas, est bordé d'ancienne minoteries.

   Une partie des maisons ont été reconverties en bars, restaurants et commerces, faisant de cette partie de la cité un pôle économique actif en période estivale. Non loin de là, se dresse un ermitage monolithe remontant aux premiers siècles de l'ère chrétienne.       Situé à 600 mètres au sud de la ville basse, l'ermitage Saint-Martial a été entièrement aménagé au creux d'une puissante falaise. D'inspiration cappadocienne, il se compose de plusieurs cellules, d'un réfectoire, d'une cuisine et d'une curieuse église monolithe, qui, bien que moins connue que celles d'Aubeterre-sur-Dronne et de Saint-Émilion, compte parmi les sommets de l'architecture soustractive dans le sud-ouest de la France. D'une grande sobriété, elle conserve une tribune taillée 

à même le roc, une statue de saint Antoine d'Égypte et une autre de saint Martial.        

          Cet ermitage fut aménagé à partir de cavités naturelles, sans doute dès les premiers temps de l'ère chrétienne (probablement IIe ou IIIe siècle). La tradition veut que saint Martial soit venu se retirer régulièrement dans ces grottes. Par la suite, une petite communauté monastique s'est employée à les agrandir.           L'église daterait (selon Charles Connoué, spécialiste de l'architecture religieuse en Saintonge) du IXe siècle, mais elle a été remaniée par la suite. Au XIe siècle, l'ermitage était un relais sur une voie secondaire du chemin de Saint-Jacques de Compostelle. Les pélerins y trouvaient un abri, puis les moines les faisaient passer en barque de l'autre côté de l'estuaire de la Gironde, en Médoc, où ils poursuivaient leur route vers Bordeaux et ses nombreux sanctuaires, ou Soulac et sa célèbre basilique Notre-Dame

          Les moines de Mortagne avaient également pour mission de secourir les marins en détresse. Cette communauté religieuse, assez réduite, resta en fonction jusqu'à la Révolution, où les derniers moines Récollets furent dispersés. L'ermitage de Mortagne est classé monument historique depuis le 13 mars 1987. Il est ouvert à la visite.         

 Des fouilles archéologiques effectuées sur le territoire communal révèlent des traces d'occupation humaine très ancienne, ce que montre notamment la présence d'un éperon barré remontant au néolithique au lieu-dit de Vil-Mortagne. Des traces d'habitation gallo-romaines ont été également découvertes, qui seraient, selon certaines hypothèses, les restes d'une villa ayant appartenu à saint Ausone, ce qui n'est pas attesté. Au IIe siècle de notre ère, un ermitage monolithe est fondé par des moines, qui creusèrent au fil des siècles un ensemble comportant cellules et église à même la falaise, selon des techniques que l'on retrouve à Aubeterre-sur-Dronne.

Vers le XIIe siècle, Mortagne devint une place fortifiée, ce qui s'explique aisément étant donné la topologie des lieux, formant un promontoire protégé par des falaises.

           Des remparts et un château fort vinrent compléter l'œuvre de la nature pour former une place forte réputée imprenable. L’autorité du seigneur de Mortagne était appuyée par le prieuré des chanoines réguliers de l’ordre de Saint-Augustin qui gérait alors 9 paroisses.

          Durant la guerre de Cent Ans, la ville se trouvera au centre d'interminables combats entre les partis anglais et français. En 1378, lors d'un nouveau siège de la cité par les troupes anglaises, le prince gallois Yvain de Galles, allié du roi de France, périra assassiné par le mercenaire Jon Lamb. La place forte, finalement conquise par les Anglais, passera définitivement entre les mains françaises en 1460 à la suite d'une bataille remportée par François de Montberon. Ce fait d'arme vaudra à la ville l'honneur de devenir une principauté.

          En 1580, au moment des guerres de religion, Mortagne, place forte catholique, est conquise et mise à sac par les troupes du « poète-soldat » Agrippa d'Aubigné. Le prieuré et l'église Saint-Étienne sont incendiés.

        Quelques années plus tard, en 1622, Louis XIII en personne vint soutenir les opérations militaires et délivra la principauté de Mortagne.

          Par la suite, Armand Jean-Duplessis, cardinal de Richelieu, ministre de Louis XIII deviendra prince souverain de Mortagne de 1624 à 1642.

  Le port :Le creusement du bassin à flot fut commencé au XVIIIe siècle. Le port de Mortagne deviendra à la fois un port militaire, de commerce et de pêche, abritant, entre autres, des navires de la Royale. À cette époque, la ville se divise en deux quartiers principaux : la ville-haute, siège des représentants du prince, des autorités religieuses et de la bourgeoisie, et la ville basse, regroupée autour du port, qui devient le poumon économique de la cité. On y installe de nombreuses minoteries, des entrepôts, une cimenterie. La Révolution verra la fin de la principauté et la transformation de la ville en commune du canton de Cozes. En 1906, la Marine nationale s'emploie à élargir le port, qui recevra jusqu'en 1914 des navires militaires, notamment des contre-torpilleurs et des sous-marins.Plusieurs cargos assureront également des liaisons

  commerciales régulières, en particulier avec le Royaume-Uni, lesquelles ne cesseront qu'avec le début de la seconde guerre mondiale. En 1939, le port de Mortagne est classé troisième port de l'estuaire de la Gironde, après Bordeaux et Blaye.      Église Saint-Étienne Les origines de cette église remontent au moins au XIIe siècle, même s'il ne subsiste plus guère d'éléments datant de cette période, sinon quelques pans de murs (parties du chevet et du transept) et une série de chapiteaux historiés au niveau des croisillons (inscrits aux monuments historiques). Au Moyen Age, elle est une des deux églises paroissiales de la ville, avec l'église Notre-Dame, aujourd'hui disparue. Siège d'un prieuré conventuel augustinien, elle a autorité sur plusieurs paroisses alentours, dont Cozes, Saint-Seurin-d'Uzet, Gémozac ou Champagnolles. .Incendiée et pillée durant les Guerres de religion par les troupes d'Agrippa d'Aubigné .,

elle est reconstruite une fois la paix revenue, mais est de nouveau en fort mauvais état au début du XVIIIe siècle. Une grande campagne de travaux est menée à partir de 1769. En 1859, le clocher-porche en pierre de Bourg, couronné d'une flèche servant d'amer aux navigateurs, est édifié. Il est repris en 1870 par l'architecte Aimé Bonnet.

       L'église Saint-Étienne, d'une grande sobriété, est en forme de croix latine. Elle comprend une nef unique de quatre travées, éclairée par une série de baies en plein cintre où ont été placés des vitraux colorés, issus des ateliers Dagrant et datant de 1889. Le transept conserve une série de chapiteaux médiévaux, seules 

 survivances de l'ancienne église. 

 Des pilastres servent d'appui à une voûte d'arêtes en anse de panier, qui couvre la quasi-totalité de l'édifice. En ciment armé, elle date de la fin du XIXe siècle et remplace un ancien lambris.    

De nombreux indices semblent indiquer la présence d'une crypte sous le

 croisillon nord; la tradition veut que des compagnons de Charlemagne y aient été inhumés. Plusieurs religieux et différentes personnalités mortagnaises sont enterrées sous les dalles de l'église, suivant une coutume ancienne. Le mobilier de l'église comprend un retable d'époque Louis XVIII, dans un goût proche de celui de Saujon, une chaire Louis XIII, un chemin de croix du XVIIIe siècle et une statuaire datant essentiellement du XIXe siècle.      
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