Eure (27)

 
 

1700 - 1749

 
     
 

Ezy sur Eure

 

 

    Nichée au coeur de la vallée d’Eure, entre le Royaume de France et le Duché de Normandie, Ezy offre à ses habitants et à ses visiteurs, son patrimoine, son accueil, ses services, ses loisirs, son cadre de vie.
    Les caves creusées dans le calcaire marneux de la colline au XVIIIe siècle pour y entreposer le vin et échapper ainsi à l’octroi. Ces caves furent aussi habitées par une population hétéroclite de 1876 à 1914.

Ezy-sur-Eure était autrefois appelée la cité des « peigneux ». Et pour cause : utilisant la force motrice de l’eau, qui actionnait toutes sortes de machines, les habitants d’Ezy et des environs se spécialisèrent jadis dans la fabrication de peignes. Activité complémentaire, le peigne devint au XIXe siècle une industrie à part entière, grâce au chemin de fer et à la proximité de la capitale, qui favorisèrent la vente mais aussi l’achat des matières premières animales (ivoire, cornes de buffles, écailles de tortues…) Installé dans une ancienne manufacture, le musée abrite comme son nom l’indique une magnifique collection de peignes mais aussi d’anciennes machines-outils. On y découvrira toutes les étapes de la fabrication, très complexe, d’un objet apparemment très simple !

    Ces anciens ateliers des "peigneux" permettent une plongée dans le XIXe siècle à travers l’évocation d’un mode de vie et de savoir-faire liés à la fabrication des peignes. Dans la maison de maître, une collection de peignes et parures évoque le raffinement d’objets usuels devenus parures et objets d’art.

        Vous allez trouver ci-dessous les écrits du curé   qui relate les grands froids de 1709 ainsi que l'assassinat d'une prieure d'Évreux, dans la foulée la retraite de l'armée Française durant la guerre  qui l'opposait à l'Espagne, voulant mettre Philippe V sur le trône, des inondations en 1711 et en 1787.

 

HISTOIRE DU GRAND HYVER (1709)

Texte original écrit par l’abbé Le Mercier curé d’Ezy à l’époque.

Il commença le 6ème de janvier de l’année 1709 jour des Rois. La veille il plût et le jour des Rois la gelée fut prodigieuse. Elle continua de plus en plus jusques au 28 du mois ; ensorte qu’il n’estoit point d’homme sur terre qui en eut veu une semblable, ny entendu parler, ny leu dans l’histoire. Il geloit jusques au coin du feu et le vin auprex du feu ne dégeloit qu’apeine. La rivierre prit de plus d’un pied d’épaix. On coupoit la glace avec des cognées et autres instrumens pour faire aller un des deux moulins, et les glaçons qu’on en tiroit estoient comme des pierres de tailles. Les neiges estoient aussy prodigieuses que la gelée. Il y en avoit jusques aux genoux également. Cette gelée fut si forte que les chènes de 40 ans fendoient par le milieu du tronc en deux ou trois, on les entendoit dans le vieil parc et dans la forest faire du bruit en s’ouvrant comme des pétars et après la gelée tous se refermèrent. Il n’y eut point de cave si profonde ou la gelée ne pénétrat. La plus part des cidrex furent perdus dans les céliers. Les volailles tomboient mortes dans leurs pouliers, les bestes dans leurs tanierres et les hommes avoient bien de la peine à s’échaufer surtout la nuit, plusieurs brulèrent icy leur lin pour les échauffer. On trouvoit les poules d’eau mortes le long des rives de la rivierre. Les ramiers au pied des arbres, tout le gibier presque mort sur la terre dans les terriers. Il resta fort peu de lapins, encore moins de lièvres et très peu de perdrix. On leur fesoit donner à manger, mais les corneilles le ravissoient. On prenoit les lièvres a la main, qui n’avoient pas la force de courir. Tout le gibier estoit si maigre qu’il ne valoit pas le manger. On  ne  voyoit  plus  d’oyseaux  et  on n’entendit guères au printemx. Jamais on ne vit tant d’oyseaux étrangers sur la rivierre si extraordinaires ny si beaux, entr’autres des jacobins qui sont blancs par le corps avec un collier si noir et la teste de toutes couleurs. Monseigneur de Vandôme et tous ses gens tiroient sans cesse sur la riverre. Mais son Altesse alloit de temx en temx se chaufer aux cordeliers.

Cette gelé frapa beaucoup la vieillesse des animaux et des arbres, mais épargna un peu la jeunesse.

Il ne resta presque poin de vieils arbres surtout de ceux qui sont tendres. Pour dire une messe basse il falloit deux réchaux : un proche du calice et l’autre des burettes, de l’eau bien chaude pour faire l’eau bénite.

  Nous ne disions plus de hautes messes ; j’ay veu tous mes paroissiens a l’Eglise ayant tous les cheveux et la barbe toutes blanches de leurs haleines, qui glaçoient en sortant de leurs bouches.

Ce jour là la gelée recommença aussy fort qu’auparavant surtout depuis le 18 jusques au 23. D’ou vent et d’ou rible qui coupient le visage. Ce rible découvrit les terres et les vignes sur lesquelles il y avoit un bon pied de nèges et porta toutes les neiges dans les fonds et dans les rays. La terre ainsy découverte après la fonte des premierres nèges, poin la gelée, ensorte que tous les bleds du Royaume et presque de toute l’Europe furent perdus a la réserve des rays en certains endroits après le 23. Le vent et le rible tombèrent mais la gelée continua jusques au 3e de mars après quoyvint le dégel. Alors on commença a tailler les arbres. Tous les vieils se trouvèrent morts et dans les jeunes l’écorce parut verte et le bois noir. Ils repoussèrent tous a cette sève ; mais a la seve d’Aoust une partie se fanèrent et au printems suivant il en mourut un tiers et beaucoup d’autres pendant l’esté et l’automne. La plus part des vignes furent gelées. Il y en eust un tiers qui ne repoussa point et l’autre tiers qui repoussa dans la souche… Les bourgeons qui se trouvèrent sous la neige donnèrent du vin, mais il en fut très peu, parce que le vent avoit tout découvert dans tout le vignoble d’Ezi, il y en eust que trois a 4 pièces. L’année suivante il n’en fut pas d’avantage a Ezi ; mais il en fut un peu plus sur la rivierre de Seine. Néanmoins le vin fut rare pendant trois ans. La 1e année fut gelée le 29 de may ; mais il en estoit beaucoup de vieil. La 2e fut gelée par le grand hyver dont je fais l’histoire et la 3e manqua parce que le jeune bois qui avoit poussé dans la souche n’estoit pas propre à faire du frais, outre que nous eûmes la gelée au commencement de may qui gela plus des 2 tiers des bourgeons. Le cidre devint rare aussy. Le vin valut jusques a 300 tt ------, la queüe et le cidre 140 tt------le tonneau. On fut contraint de faire de la bierre mais on ne s’y accoutumoit guères en ce pays. Cependant les bleds faisoient toujours grand bruit. Les uns vouloient qu’ils fussent gelés et les autres soutenoient que non. Il y eust une défence même de la part de Roy de les relabourer ; il y en eust qui le firent en cachette pour ressemer du seigle ou du meteil qu’ils épièrent mais il n’eust rien dans l’épy, en un mot les grains ne vinrent point en maturité. Depuis le commencement de mars jusques a la fin de la dite année 1709 les grains poussèrent mais doucement. Le meilleur bled ne payoit pas 30 tt a paques ; mais sitôt que les bleds ne donnèrent plus d’espérance il haussa  (voir page suivante)

 

     
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